Proton-K | 7 juillet 1988

Le 160ème lanceur Proton-K (8K82K n°356-02), surmonté d'un étage supérieur Bloc D-2 (11S824F n°2L), a décollé du pas de tir n°39 de la zone n°200 (8P882K-4F) du cosmodrome de Baïkonour le 7 juillet 1988 à 17h38'04,325" GMT.

La charge utile était constituée de la sonde d'exploration martienne Fobos-1 (1F n°101).

1. La sonde Fobos-1

La partie haute, sur ce lancement a une masse totale de 25480kg. La sonde elle-même a une masse au lancement de 6220kg, ce qui inclut une charge utile scientifique de 540kg [3].

Elément Masse (kg)
Bloc D-2 rempli 17794,3
Adaptateur 158,3
Coiffe 1307,4
Sonde Fobos-1 6220,0
Total 25480
Tableau 1.1 : Bilan de masse de la partie haute [3].

Fobos-1 est identique à Fobos-2, qui sera lancée le 12 juillet 1988, à ceci près que, pour des raisons de masse, elle n'emporte ni l'instrument Termoskan, ni l'atterrisseur PrOP-FP [3].

Elément Masse (kg)
Masse à vide 2647,2
Masse d'ergols dans l'ADU 3158,65
Masse d'ergols dans le Bloc Orbital (OB) 414,825
Total 6220,675
Tableau 1.2 : Bilan de masse de la sonde Fobos-1 [3].

2. Le trajet Terre-Mars

Les trois étages du lanceur Proton-K placent la partie haute sur une trajectoire balistique, puis le Bloc D-2 est mis en service une première fois pour assurer la mise sur orbite basse. Un second allumage permet de placer la sonde sur une trajectoire interplanétaire, et il fournit un delta-V de 3426,6m/s, significativement supérieur à l'attendu (3347,83m/s). Cela s'explique par le fait qu'il est conduit jusqu'à épuisement total de l'un des ergols, ce qui laissait une marge d'incertitude lors des prévisions [3].

Le Bloc D-2 largue Fobos-1 le 7 juillet 1988 à 19h01'12,7" GMT. Le moteur S5.92 de la sonde est mis en service en mode forte poussée 70" plus tard (dt=115,9", dV=370,2m/s, dm=703,1kg) afin de poursuivre l'injection sur la trajectoire Terre-Mars [3].

Le signal de la sonde est reçu pour la première fois par l'OKIK-16 d'Eupatorie à 19h06'20" GMT, et indique que tous les systèmes fonctionnent correctement. La sonde est orientée en direction du Soleil et quelques instruments sont mis en service, comme Morion [3].

Le 14 juillet 1988, l'orientation de la sonde est basculée en mode trois axes, en vue de la correction du surlendemain. La correction est réalisée le 16 juillet 1988, toujours avec le S5.92 mais cette fois en mode faible poussée (dt=5", dV=8,7m/s, dm=25kg). Le 23 juillet 1988, le télescope Terek est mis en service et permet de réaliser des études du Soleil. L'expérience est renouvelée et, au total, 140 images du Soleil sont transmises [3].

A partir du 5 août 1988, le contrôle de la sonde est assuré en doublure par le Centre de Contrôle des Vols (TsUP) de Kaliningrad. A partir du 16 août 1988, le TsUP devient le centre de contrôle principal, et l'OKIK-16 le centre de secours [3]. La mise sur orbite martienne est prévue le 23 janvier 1989 [2].

3. Perte de la sonde

Lors de la séance de communication du 28 août 1988, le TsUP envoie à la sonde une commande informatique pour mettre en service le spectromètre GS-14, mais l'opérateur oublie la lettre V. Son collègue chargé de contrôler la commande avant l'envoi ne détecte pas l'erreur. Sans la lettre V, qui signifie que le programme est écrit en système octal ("Восьмеричная"), l'ordinateur de la sonde considère que le programme est écrit en système décimal, et l'interprète comme tel [3].

Le 31 août 1988, le programme erroné démarre automatiquement et, 53" plus tard, à 07h01'19" GMT, il commande la fermeture de la vanne pneumatique d'alimentation du système de stabilisation et d'orientation DUOiS.

L'orientation de la sonde n'étant plus assurée, celle-ci perd son pointage stellaire. La perte du pointage est détectée par le Boîtier d'Orientation et de Stabilisation (BOS), qui démarre automatiquement l'ordinateur de bord LG499. En temps normal, ce dernier devrait alors envoyer les ordres nécessaires pour rétablir l'orientation au moyen des moteurs du système DUOiS. Mais la fermeture de la vanne d'alimentation en ergols n'avait pas été envisagée à la conception, et l'ordinateur n'est pas programmé pour commander sa réouverture [3].

Au TsUP, personne ne sait encore ce qui est en train de se passer à bord de la sonde. La prochaine séance de communication est programmée pour le 2 septembre 1988. Ce jour là, Fobos-1 n'émet aucun signal [4].

Cliquez ici si vous ne voyez pas la vidéo.

Vidéo 1 : Le journal télévisé du 9 septembre 1988 annonce les problèmes de la mission.
Alain CIROU fait une petite erreur : Fobos-1 n'était pas équipée de l'atterrisseur PrOP-F.
Crédit : INA.

L'orientation vers le Soleil étant perdue, les batteries se déchargent peu à peu, et la sonde finit par s'éteindre. Durant tout le mois de septembre, le TsUP tente d'envoyer des commandes pour mettre hors service les systèmes non essentiels et brancher des batteries supplémentaires. Deux-cent-soixante tentatives sont réalisées, mais quand les calculs montrent que la température à bord est au mieux de 0°C, les opérations sont interrompues. Fobos-1 est déclarée perdue le 1er octobre 1988.

Bibliographie

[1] DERIAGUINE, Y., Маршевый двигатель межорбитальных космических буксиров "Фрегат", "Фрегат-СБ", Vestnik NPO Lavotchkine n°01-2014
[2] LANTRATOV, K., На Марс!, Novosti Kosmonavtiki n°21-1996
[3] POLICHTCHOUK, G., Автоматические космические аппараты для фундаментальных и прикладных научных исследований, Moscou, 2010
[4] MARKOV, Y., Курс на Марс, Moscou, 1989, p. 185


Dernière mise à jour : 15 février 2017