Voskhod | Histoire

1. Les débuts du programme

En avril 1962, alors que le programme Vostok confère à l'Union soviétique toujours plus de prestige en accumulant les succès, les autorités du Parti communiste donnent leur feu vert au développement du vaisseau Soyouz, appelé à prendre sa relève. Un problème se pose alors, car les vols Vostok doivent prendre fin en 1963, et le Soyouz ne sera pas prêt avant 1965 au plus tôt. Sergueï KOROLIOV assigne pour tâche à une cinquantaine de ses ingénieurs de modifier le vaisseau Vostok-3KA pour lui permettre de réaliser quelques missions supplémentaires durant cette période (vols Vostok-7 à Vostok-10).

Mais une mauvaise nouvelle ne tarde pas à arriver : les Américains ont annoncé qu'ils feront voler leur nouveau vaisseau Gemini dès 1964. Gemini sera capable d'effectuer des manœuvres de rendez-vous et d'amarrage sur orbite, offrira la capacité de sortir dans l'Espace et pourra embarquer deux astronautes. Il est clair que le Vostok-3KA, même modifié, ne sera pas en mesure de répondre à de telles performances.

Le 4 février 1964, le Parti communiste met fin à tous les travaux concernant le programme Vostok. Il donne aussi l'ordre à KOROLIOV de suspendre ses travaux sur Soyouz afin de se concentrer sur la préparation d'un vaisseau dérivé du Vostok capable d'emmener trois hommes dans l'Espace, et ce pendant l'année en cours, de façon à devancer les vols Gemini.

Les ingénieurs de l'OKB-1 sont très récalcitrants vis-à-vis de ce projet, car il est évident que sa mise en œuvre nécessitera l'abandon de nombreux systèmes dédiés à la sécurité de l'équipage. En février 1964 KOROLIOV décide de remettre ses ingénieurs au pas. Il leur annonce que si le projet aboutit, une place à bord du vaisseau sera réservée à l'un d'eux. Ils se mettent alors très vite au travail.

Dès le 4 février 1964 quatre cosmonautes du premier groupe, et aussi un du deuxième groupe, sont détachés sur ce programme. Il s'agit de BELIAÏEV, BEREGOVOÏ, KHROUNOV, KOMAROV et LEONOV.

Le 13 mars 1964, une réunion de la Commission Militaro-industrielle (VPK) officialise l'adoption du projet en signant le décret n°59, et le baptise Voskhod (lever de Soleil). La Commission préconise un premier lancement en août 1964, soit dans un délai de cinq mois. De plus, elle fixe un objectif secondaire à KOROLIOV : celui de réaliser une sortie dans l'Espace. L'OKB-1 avait déjà réfléchi à cette question dans le cadre des missions des Vostok modifiés, et avait baptisé ce projet Vykhod (sortie). Ce nom est réutilisé et c'est ainsi que sera désigné le nouveau projet. Le 1er avril 1964, les cosmonautes BIKOVSKI, POPOVITCH et TITOV sont à leur tour assignés au programme.

Le 13 avril 1964, le Parti communiste signe le décret autorisant le démarrage des travaux de construction de trois Voskhod et deux Vykhod. Au passage, les capsules destinées au programme Voskhod sont appelées 3KV, et celles destinées au programme Vykhod sont appelées 3KD. Le 23 avril, les cosmonautes VOLINOV et DIOMINE rejoignent le groupe qui s'entraîne pour voler sur Voskhod ou Vykhod.

2. Trois hommes dans un vaisseau monoplace

C'est l'ingénieur Evgueni FROLOV qui se voit confier la tâche de construire le 3KV. Un énorme problème se pose alors : comment faire tenir trois hommes dans une cabine déjà exiguë pour un seul ? Son collègue Konstantin FEOKTISTOV lui propose son idée : supprimer le scaphandre et le siège éjectable. La sécurité des cosmonautes serait ainsi grandement mise en péril, mais il n'existe pas d'autre moyen de gagner suffisamment de masse.

L'élimination du siège éjectable pose un problème supplémentaire, car sur les Vostok, c'est lui qui permettait aux pilotes de revenir sur Terre. Ils devaient en effet s'extraire de leurs capsules avant que celles-ci ne touchent le sol, car elles étaient dépourvues de système d'atterrissage en douceur. Or, il se trouve qu'un tel système est en cours de développement dans le cadre du programme Soyouz. KOROLIOV décide donc de l'utiliser sur le Voskhod-3KV.

Un autre problème posé par la présence à bord de trois hommes au lieu d'un est bien entendu celui du système de survie. Celui qui équipait les Vostok pouvait fonctionner durant dix jours, ce qui laissait au vaisseau le temps de retomber naturellement sur Terre en cas de panne du moteur de freinage. Sur Voskhod, il est évident qu'une telle sécurité est inenvisageable, dans la mesure où le système de survie ne pourrait fonctionner que pendant vingt-quatre heures. Il est donc décidé d'installer un second moteur de freinage en redondance.

Pendant un moment, KOROLIOV avait pensé à équiper le lanceur Voskhod d'une tour de sauvetage, et avait demandé au KB-2 d'accélérer le développement de celle qu'il prévoyait d'utiliser pour le futur Soyouz. Mais il apparaît rapidement que la tour ne pourra pas être prête à temps, et l'idée est abandonnée. Par conséquent, l'équipage ne disposera d'aucune alternative en cas d'échec pendant les quarante-cinq premières secondes après le décollage. Une fois ce seuil passé, il pourra toujours tenter de séparer le vaisseau du Bloc I et d'atterrir. Si cela se produit après la 501ème seconde de vol, le retour se fera en dehors des frontières de l'Union soviétique.

3. Les étapes

Les cosmonautes qui ont volé sur les vaisseaux Vostok sont tous des pilotes des Forces aériennes. Il en avait été décidé ainsi car seuls des pilotes chevronnés semblaient à même de mener à bien un vol spatial sur un engin aussi nouveau et révolutionnaire que le Vostok. Mais Voskhod offrira la possibilité d'envoyer trois hommes en orbite, et KOROLIOV fait état de son désir d'en profiter pour faire participer des ingénieurs et des scientifiques. Dans un premier temps, l'armée est hostile à une telle idée, mais elle finit quand même par accepter.

C'est ainsi qu'en mai 1964, sept nouveaux cosmonautes sont sélectionnés, et forment ce qui sera appelé le "groupe Voskhod". Il s'agit de BENDEROV, EGOROV, KATYS, LAZAREV, POLIAKOV, SOROKINE, ainsi que de FEOKTISTOV, un des grands ingénieurs de l'OKB-1. Les autres sont médecins, chercheurs, ou encore pilotes d'essais. De plus, CHONINE, GORBATKO, KOLODINE et ZAÏKINE sont rajoutés sur la liste des cosmonautes assignés aux programmes Voskhod et Vykhod.

Au total, cela fait donc 21 cosmonautes qui sont à l'entraînement en vue d'un vol sur Voskhod ou Vykhod. Mais très vite ils ne sont plus que dix-huit. En effet, BENDEROV et POLIAKOV sont disqualifiés pour raisons médicales, et TITOV est muté sur le programme Soyouz. Au mois de juillet 1964, BELIAÏEV, GORBATKO, KHROUNOV, KOLODINE, LEONOV et ZAÏKINE sont désignés pour s'entraîner plus particulièrement à un vol sur Vykhod-3KD.

Les étapes du déroulement du programme ont été fixées : tout d'abord, un 3KV inhabité sera lancé pour tester les technologies, et deux semaines plus tard, ce sera le tour d'un 3KV habité. L'équipage sera formé de VOLINOV, KATYS et EGOROV.

4. L'aboutissement

Au cours de l'été 1964, le programme prend un léger retard. Le tir du premier 3KV inhabité était prévu pour le 5 septembre, mais il est reporté au mois d'octobre. Les ingénieurs rencontrent en effet de grosses difficultés techniques sur le fameux moteur d'atterrissage en douceur. Le 6 septembre 1964, la capsule Vostok-2 qui avait emmené Hermann TITOV en orbite en 1961 est retirée de son musée pour être équipée du système d'atterrissage en douceur dans le cadre d'un test. Malheureusement, les choses ne se passent pas comme prévu et la capsule est détruite. Le 29 septembre, le système de télémétrie Tral (construit par BOGOMOLOV) tombe en panne.

Des incidents politiques et des luttes d'influence perturbent également le déroulement des opérations, car l'équipage VOLINOV-KATYS-EGOROV ne plait pas à tout le monde. Finalement, VOLINOV est remplacé par KOMAROV, et KATYS par FEOKTISTOV.

Le 5 octobre 1964, un essai d'atterrissage en douceur est réalisé avec succès. Dès le lendemain, un vaisseau Voskhod-3KV inhabité, renommé Cosmos 47, est mis sur orbite. Son vol dure vingt-quatre heures et se passe sans incident. Les événements s'enchaînent alors très rapidement. Le 9 octobre, KOMAROV, FEOKTISTOV et EGOROV sont confirmés pour voler sur la première mission habitée, que l'on désigne maintenant Voskhod.

Et c'est le 12 octobre 1964 que Voskhod est mis sur orbite. Le monde est stupéfait : les Etats-Unis n'ont pas encore lancé leur Gemini, et encore il ne peut emmener que deux astronautes ! La mission dure vingt-quatre heures et est couronnée de succès. Le lendemain de l'atterrissage, Nikita KHROUCHTCHEV est limogé, et c'est Leonid BREZHNEV qui le remplace à la tête du Parti communiste.

Maintenant que le vol en équipage est devenu une réalité, la seconde étape du programme peut alors être lancée.

5. Les débuts des 3KD

Revenons en arrière, au début de l'année 1964. Dès le mois de janvier, les ingénieurs de l'usine 918 chargés d'étudier les équipements nécessaires à une éventuelle sortie dans l'Espace constatent qu'un vaisseau dérivé du Vostok n'est pas en mesure de servir de plate-forme à une telle manœuvre. Le matériel électronique présent dans l'habitacle n'est pas conçu pour fonctionner dans le vide, et le volume disponible n'est pas suffisant pour accueillir un sas. Les spécialistes, dirigés par Gaï SEVERINE, émettent alors l'idée d'un sas déployable fixé à l'extérieur de la capsule. L'équipage serait réduit à deux cosmonautes (commandant et pilote), de façon à gagner en poids et en volume.

Le 13 avril 1964, comme on le sait, un décret gouvernemental lance officiellement le programme Vykhod ("Sortie") visant à démontrer la faisabilité d'une sortie dans l'Espace. Plus tard au cours du mois d'avril, le concept du sas extérieur déployable est approuvé par KOROLIOV au cours d'une réunion où lui et ses collaborateurs de l'OKB-1 rencontrent G.I. SEVERINE, N. OUMANSKI et I. ABRAMOV, de l'usine 918.

C'est ensuite une grande étude qui est menée sur les caractéristiques du sas, et aussi du scaphandre. Car ne l'oublions pas : personne au monde ne possède à cette époque la moindre expérience concernant des combinaisons aptes à assurer la survie d'un homme dans le vide spatial. Le 9 juin 1964, le cahier des charges arrêtant les spécifications du sas et du scaphandre est signé, et le 8 juillet le gouvernement certifie l'usine 918 comme constructeur principal. Là-bas, c'est l'ingénieur Boris V. MIKHAÏLOV qui est placé à la tête du projet.

6. Vers la première sortie

Au mois de juillet 1964, alors que le premier Voskhod n'a pas encore volé, les ingénieurs de l'usine 918 construisent une maquette du sas Volga. Celle-ci permet de valider les choix technologiques qui avaient été faits et offre la possibilité de tester la manœuvrabilité d'un homme en scaphandre à l'intérieur du sas. Toujours au mois de juillet, six cosmonautes qui s'entraînaient pour voler sur le Voskhod-3KV sont détachés sur le programme Vykhod-3KD. Il s'agit de BELIAÏEV, GORBATKO, KHROUNOV, KOLODINE, LEONOV et ZAÏKINE. Trois équipages sont alors formés :

Commandant Pilote
Equipage principal BELIAÏEV LEONOV
Equipage de réserve GORBATKO KHROUNOV
Second équipage de réserve ZAÏKINE KOLODINE

En août 1964, le pilote d'essais S. ANOKHINE (OKB-1) enfile une maquette de combinaison Berkout et effectue plusieurs manœuvres dans le sas. Un avion Tu-104 modifié du LII Gromov sera aussi utilisé pour simuler l'apesanteur et mettre au point certaines procédures.

Les 24 et 25 septembre 1964, Nikita KHROUCHTCHEV visite le cosmodrome de Baïkonour. A cette occasion, une démonstration de sortie dans l'Espace est réalisée. Pendant ce temps, les ingénieurs de l'OKB-1 ne chôment pas. Sous la direction de P. TSYBINE, ils ont mené à bien toutes les tâches nécessaires à la mise au point du vaisseau 3KD.

Au mois de décembre 1964, la première mission d'un Vykhod-3KD est programmée pour mars ou avril 1965. En janvier ou février, un vol inhabité du 3KD est également prévu.

Le 13 janvier 1965, alors que la date du lancement se rapproche, le quatrième exemplaire du sas Volga, celui qui doit servir à effectuer la première sortie dans l'Espace, est endommagé lors d'un essai au sol. Heureusement les réparations ne prennent pas beaucoup de temps et le sas est emmené à Baïkonour pour qu'il y soit préparé à un vol spatial. Plus tard au cours du mois de janvier, un autre problème survient : GORBATKO, le commandant de l'équipage de réserve, connaît des problèmes de santé et doit être écarté du programme, et c'est ZAÏKINE qui le remplace (en revanche, personne ne remplace ZAÏKINE).

D'autre part, BELIAÏEV a eu des difficultés lors d'un test en centrifugeuse, et le général KAMANINE a de plus en plus d'inquiétudes vis-à-vis de sa santé. Il demande alors à KHROUNOV, qui a le poste de pilote de l'équipage de réserve, de s'entraîner en plus pour jouer le rôle de commandant, juste au cas où. Le 15 janvier, le général KAMANINE note dans son journal que "la paire KHROUNOV-LEONOV est vraiment plus forte que la paire BELIAÏEV-LEONOV".

Le 6 février 1965, au cours d'une réunion de la Commission d'Etat, il est décidé de lancer le premier 3KD inhabité entre le 14 et le 16 février. Si le vol se passe bien la première mission habitée suivra entre le 25 et le 27 février. Le 9 février, la Commission confirme les équipages précédemment nommés.

Le 12 février, le lancement du 3KD inhabité est reporté de quarante-huit heures. Le premier vol habité est en conséquence repoussé au début de mars (le 4 ou le 5). Finalement, le 3KD inhabité, baptisé Cosmos 57, décolle le 22 février. Le sas Volga se déploie sans aucun problème devant les caméras vidéos embarquées. Mais au cours de la troisième orbite, le système d'autodestruction est actionné et le vaisseau explose.

Cet accident est dû à un problème de communication qui n'aurait pas pu intervenir si des cosmonautes se trouvaient à bord. Après cet échec, le général KAMANINE propose de reporter la première sortie dans l'Espace à plus tard et d'effectuer un vol d'essai du 3KD avec un seul homme à bord. Cette idée est immédiatement rejetée par KOROLIOV, car elle ne constitue pas une « grande première spatiale ».

Comme Cosmos 57 n'a pas pu terminer sa mission, plusieurs inconnues demeurent. Les deux principaux sujets d'inquiétude sont l'éjection du sas et la rentrée atmosphérique. En ce qui concerne l'éjection, la décision est prise de réaliser de nouvelles simulations au sol. En revanche, le problème de la rentrée persiste. En effet, la présence lors de la pénétration de l'atmosphère de l'anneau de fixation du sas sur le fuselage du vaisseau modifie le profil aérodynamique de celui-ci.

Il est alors décidé d'équiper un satellite Zenit-4 (11F69) d'un anneau de fixation, afin d'en étudier les effets sur la rentrée. C'est Cosmos 59 qui hérite de l'anneau : il décolle le 7 mars 1965 et atterrit une semaine plus tard. Les résultats de l'essai sont concluants. Entre temps, une autre capsule avait été larguée d'un hélicoptère pour vérifier le bon déroulement des opérations d'atterrissage. Malheureusement, le parachute ne s'était pas ouvert et l'engin s'était écrasé. Tous ces échecs à répétition font penser à l'éventualité d'un saboteur, et Moscou dépêche un certain nombre d'agents du KGB pour surveiller les opérations.

Le 9 mars, les cosmonautes s'étaient rendus à Baïkonour et avaient commencé leur préparation finale. Ce même jour, lors d'une réunion, la Commission d'Etat était arrivée à la même conclusion que KAMANINE quelques semaines plus tôt : KHROUNOV était bien meilleur que BELIAÏEV. Cependant, comme ce dernier formait avec LEONOV un équipage réellement soudé, il conserverait son poste.

La Commission avait par ailleurs décidé que le jour du lancement, seuls BELIAÏEV, LEONOV et KHROUNOV revêtiraient leur scaphandre. KHROUNOV devrait se tenir prêt à remplacer l'un ou l'autre des membres de l'équipage principal.

On notera également que c'est à peu près à cette époque que le nom Vykhod disparaît de la littérature soviétique. Dorénavant, 3KV et 3KD son indistinctement dénommés Voskhod. Le 16 mars, lendemain de l'atterrissage de Cosmos 59, une nouvelle réunion de la Commission d'Etat fixe le lancement du premier 3KD habité - maintenant appelé Voskhod-2 - au 18 mars 1965.

Et c'est bien ce jour là que le vaisseau Voskhod-2 décolle. Après quelques orbites, LEONOV devient le premier homme à sortir dans l'Espace. Il rencontre quelques problèmes avec sa combinaison Berkout, mais dans l'ensemble tout se passe bien.

L'atterrissage, lui, ne se passe pas sans difficulté : les équipes de récupération mettent plusieurs jours à retrouver les cosmonautes. Il n'empêche que la mission est un succès. Les Américains n'effectueront leur propre sortie que trois mois plus tard, au cours de la mission Gemini IV.

7. Les projets pour l'après Voskhod-2

Après le vol réussi de Voskhod-2, les Américains ont entrepris toute une série de missions qui ont pulvérisé les records des cosmonautes soviétiques. Que ce soit dans le domaine de la durée des vols, des techniques de rendez-vous en orbite ou des sorties dans l'Espace, le programme Gemini permet aux Etats-Unis de devancer l'Union soviétique.

Cette dernière ne compte évidemment pas laisser durer cette situation. En attendant l'avènement du nouveau et révolutionnaire vaisseau Soyouz, les responsables moscovites estiment que Voskhod peut encore être utile.

Plusieurs missions sont mises sur pied par KOROLIOV :

- En juillet-août 1965, un 3KV avec des animaux à son bord effectuera un vol allant de 15 à 30 jours.

- En septembre-octobre 1965, un autre 3KV (Voskhod-3) emmènera un pilote et un scientifique sur un vol où sera testé le principe de gravité artificielle.

- En mars-avril 1966, un 3KV (Voskhod-4) effectuera un vol d'une quinzaine de jours, destiné à des études biomédicales, avec un pilote et un médecin. Dans cette perspective, trois médecins sont recrutés (ILLINE, KISELIOV et SENKEVITCH).

- Au cours de l'année 1966, deux 3KD (Voskhod-5 et 6) effectueront des vols visant à perfectionner les techniques de sortie dans l'Espace. Il est prévu que la mission Voskhod-5 sera conduite par un équipage féminin (PONOMARIOVA et SOLOVIOVA). Il existe aussi un projet audacieux pour Voskhod-6 : tester pour la première fois un UPMK (une unité individuelle de déplacement dans l'Espace). L'usine 918 a une proposition pour un tel engin, mais l'idée restera sans suite.

De plus, KOROLIOV projette de faire voler un journaliste sur l'une des futures mission Voskhod. Plusieurs hommes sont sélectionnés au sein d'un groupe spécial (GOLOVANOV, LETOUNOV et REBROV).

Mais l'Armée de l'Air n'entend pas les choses de la même façon et réalise ses propres projets où toutes les expériences biomédicales sont remplacées par des expériences militaires. Commence alors une interminable dispute entre l'Armée et KOROLIOV. Ce dernier cherche à obtenir l'annulation de l'expérience de gravité artificielle, qui permettrait de laisser la place aux expériences médicales. En novembre 1965, il décide d'annuler purement et simplement les vols Voskhod-5 et Voskhod-6. Les sorties dans l'Espace qu'ils devaient effectuer le seront sur les vaisseaux Soyouz.

Le 15 décembre 1965, les vaisseaux américains Gemini VI-A et Gemini VII réalisent un rendez-vous orbital au cours duquel ils s'approchent jusqu'à quelques centimètres l'un de l'autre. Le lendemain, la Commission Militaro-industrielle (VPK) se réunit pour fixer un planning précis pour la suite du programme Voskhod. Mais les désaccords entre l'Armée et l'OKB-1 sont si importants que la VPK ne parvient à arrêter aucune date. La seule décision prise au cours de la réunion est celle de faire voler Voskhod-3 et 4 avant le prochain Congrès du Parti communiste, qui débute le 21 mars 1966.

Le 14 janvier 1966, Sergueï KOROLIOV décède sur la table d'opération. C'est Vassili MICHINE qui prend sa succession à la tête de l'OKB-1. Il est décidé de faire voler Voskhod-3 au mois de mars afin de battre un nouveau record de durée (une vingtaine de jours). Comme les effets sur l'organisme d'un séjour aussi long en apesanteur sont inconnus, un vaisseau emportant des animaux précédera le vol humain. C'est ainsi qu'un vaisseau 3KV, baptisé Cosmos 110, décolle de Baïkonour le 22 février 1966 avec deux chiens à son bord.

Fig. 7.1 : Veterok et Ougoliok, les passagers de Cosmos 110.
Crédit : IMBP.

Après ce vol réussi, les responsables fixent la date de lancement de Voskhod-3, ainsi que ses objectifs précis. L'équipage principal sera composé de VOLINOV et CHONINE (doublures : BEREGOVOÏ et CHATALOV; triplures : GORBATKO et KATYS). Il devra mener à bien une mission de dix-huit jours.

La date de décollage est fixée entre le 10 et le 20 mars 1966. Quelques temps plus tard, elle est repoussée au 20 ou au 22 avril. Le 27 mars 1966, un lanceur Molnia-M - très semblable au Voskhod - explose au décollage. La crainte que l'accident ne se renouvelle pour le vol habité de Voskhod-3 pousse les ingénieurs à reporter le tir au mois de mai.

Cependant, le sort de Voskhod-3 est scellé le 10 mai, lors d'une réunion de la Commission Militaro-industrielle. Ce jour là, alors que toutes les personnes présentes se sont accordées pour procéder au lancement entre le 25 et le 28 mai, SMIRNOV, président de la Commission, décide purement et simplement d'annuler le vol. Il pense en effet qu'il n'apportera rien de nouveau, et surtout que l'absence de manœuvres en orbite prouvera aux Américains que le programme soviétique est en retard par rapport au programme américain.

Tous les vols sont donc annulés et les efforts sont concentrés sur le nouveau vaisseau Soyouz.

8. Conclusion

Le programme Voskhod a démarré au début de l'année 1964. Moins d'un an plus tard il avait permis de réaliser le premier vol en équipage, de réaliser de nombreuses avancées dans le domaine médical (grâce à la présence d'EGOROV sur le premier Voskhod) et surtout d'effectuer la première et historique sortie dans l'Espace.

Toutes ces avancées ont été rendues possibles en poussant les technologies existantes à leur extrême limite, au détriment de la sécurité. Certains avanceront que tout ceci n'a été entrepris que dans un but guerrier - vaincre les Etats-Unis dans la course à l'Espace. Dans les années 1990, Vassili MICHINE va même jusqu'à déclarer que "ce programme n'a contribué en aucune manière au développement de la recherche spatiale" et que "c'était une pure perte de temps".

Ces propos sont compréhensibles, mais il ne doivent pas faire oublier l'exploit technologique qu'a représenté Voskhod, ni les avancées qu'il a permises - notamment dans le domaine médical et sur la faisabilité des sorties dans l'Espace.


Dernière mise à jour : 6 février 2014