Briz | Histoire

L'entreprise Khrounitchev dispose d'un lanceur léger, Rokot, et d'un lanceur lourd, Proton. C'est pour les équiper qu'elle a développé un étage supérieur, le Briz, dans deux versions différentes. Le terme russe briz (« бриз ») est transparent : il signifie « brise ».

Le Briz-K pour les premiers lanceurs Rokot

Au début des années 1990, le GKNPTs Khrounitchev de Moscou envisage la création d'un lanceur léger à vocation commerciale. Ce projet, baptisé Rokot, utilisera un missile bi-étage UR-100NU dont les militaires n'ont plus l'utilité depuis la fin de la Guerre Froide.

Cependant, l'UR-100NU est conçu pour emmener des charges utiles (en l'occurrence des bombes thermonucléaires) sur des trajectoires balistiques, mais pas pour les mettre en orbite. Pour arriver à cet objectif, il faudra développer un troisième étage capable d'atteindre la vitesse de satellisation.

Fig. 1 : Décollage d'un missile à deux étages UR-100.
Crédit : GKNPTs Khrounitchev.

C'est ainsi que naît le projet d'étage Briz-K (14S12). Il effectue ses premiers vols balistiques lors des essais en vol de Rokot en novembre 1990 et en décembre 1991. Son premier vol orbital intervient le 26 décembre 1994, quand il met en orbite le satellite russe Radio-ROSTO.

Le Briz-M pour le lanceur Proton

Parallèlement, Khrounitchev exploite aussi un lanceur lourd depuis plusieurs décennies, Proton, qui est équipé d'un étage supérieur depuis ses tout premiers vols dans les années 1960. Il s'agit du Bloc D et ses dérivés, construits par la RKK Energuia.

Or, ces étages présentent plusieurs inconvénients. Ils ont montré au cours de leur carrière qu'ils n'étaient pas suffisamment fiables, et ils utilisent des ergols différents de ceux du lanceur, ce qui complexifie les opérations.

Fig. 2 : Préparation d'un étage de type Bloc DM-2M à Baïkonour.
Crédit : Gazprom Space Systems. Lancement du 24 novembre 2003.

Khrounitchev s'est lancé en 1992 dans le développement d'une version largement améliorée de son lanceur, appelée Proton-M. Elle est non seulement destinée à lancer des satellites commerciaux, mais à terme elle devra mettre en orbite les gros satellites militaires russes.

Ainsi, le Ministère de la Défense s'inquiète de la capacité de Khrounitchev à lancer des charges suffisamment lourdes, et en 1994 il lance un appel d'offres pour le développement d'un nouvel étage capable d'équiper Proton-M.

Tous les grands acteurs du spatial russe tentent leur chance : la RKK Energuia bien sûr, mais aussi la NPO Lavotchkine et le KB Makeïev. Khrounitchev, de son côté, propose de développer une version lourde du Briz-K, appelée Briz-M (14S43). Les militaires sont séduits par ce projet, car ses coûts sont limités et il est déjà bien avancé dans le cadre du programme Rokot. Sans surprise, c'est donc lui qui remporte la compétition.

Fig. 3 : Maquette de l'étage Briz-M présentée au Salon du Bourget de 1995.
Crédit : Air&Cosmos / Christian LARDIER.

Le Briz-M sera de conception similaire au Briz-K de Rokot. La principale différence est qu'il sera pourvu d'un gros réservoir torique supplémentaire (Fig. 3) pour pouvoir emporter des charges beaucoup plus lourdes.

Le développement commence dès 1995, et la construction des premiers éléments démarre en 1996. Le 13 mars 1997, Khrounitchev procède à l'assemblage du premier exemplaire du Briz-M, et les essais statiques commencent. En juin 1997, l'étage est convoyé jusqu'en France pour être exposé au Salon du Bourget, c'est dire l'enjeu commercial que Khrounitchev voit derrière ce projet.

Fig. 4 : Le premier Briz-M au Salon du Bourget de 1997.
Crédit : Air&Cosmos / Christian LARDIER.

L'étage est ensuite ramené à Moscou, et il est achevé le 10 novembre 1998. En attendant que Proton-M ne réalise son vol inaugural, le Briz-M va être d'abord testé sur un lanceur d'ancienne génération Proton-K. Le lancement est prévu pour le 20 décembre 1998 avec un satellite Radouga.

Mais des inspections montrent des défauts, et les essais électriques prennent du retard. Le décollage est reporté en mars, avril, mai puis au 5 juillet 1999. Mais un dysfonctionnement du deuxième étage met un terme à la mission avant que le Briz-M n'ait pu être testé.

Un deuxième vol d'essai va avoir lieu en novembre 1999, mais il est reporté à juin 2000. Cette fois, le Briz-M place un satellite Gorizont sur une orbite géostationnaire sans incident.

Fig. 5 : Le deuxième Briz-M au sommet d'un lanceur Proton-K, 1er juin 2000.

En avril 2001, un Briz-M vole avec le premier lanceur de nouvelle génération Proton-M, et la mission est un succès total. Depuis, le Briz-M est devenu le fer de lance de la société International Launch Services, qui commercialise le Proton-M en concurrence d'Ariane 5.

Le Briz-KM pour la version commerciale de Rokot

Au début des années 1990, Khrounitchev envisage d'utiliser son lanceur léger Rokot pour des missions commerciales. Il faut pour cela développer un étage supérieur plus performant que le Briz-K.

Une version améliorée Briz-KM (14S45) est ainsi mise à l'étude. Il est dévoilé pour la première fois en 1995 lors du Salon du Bourget. Il est basé principalement sur le bloc central du Briz-M de Proton, lui-même inspiré du Briz-K.

Fig. 6 : Maquette de l'étage Briz-KM présentée au Salon du Bourget de 1995.
A ce stade, il semble beaucoup plus proche du Briz-K qu'il ne le sera à terme.
Crédit : Air&Cosmos / Christian LARDIER.

La société américaine Motorola, qui désire lancer ses satellites Iridium sur Rokot, participe fortement au financement du développement du Briz-KM. La production du Briz-KM commence à la fin 1996, et le premier vol intervient en mai 2000.

Bibliographie

- LARDIER, Christian, Nouveaux moteurs et lanceurs de Khrounitchev, Air&Cosmos n°1526
- LARDIER, Christian, ILS revendique 50% du marché, Air&Cosmos n°1618
- ZHOURAVINE, Youri, Разгонный блок «Бриз–М», Novosti Kosmonavtiki n°211
- MOKHOV, V., "Рокот" стартует из Плесецка, Novosti Kosmonavtiki n°210


Dernière mise à jour : 26 juillet 2010