KazSat | Histoire

Au début des années 2000, non contente de voir des dizaines de fusées décoller de son sol sans y participer, la République du Kazakhstan décide de se lancer dans un programme spatial sur trois ans, allant de 2005 à 2007. La construction des lanceurs Baïterek et Ichim est décidée, ainsi que la création de plusieurs infrastructures. L'agence Kazcosmos est créée pour fédérer les projets. Mais l'accession au statut de « puissance spatiale » passe avant tout par la réalisation d'un satellite national. C'est ainsi qu'en 2003 naît le projet KazSat.

L'engin, de taille modeste, sera dédié aux télécommunications et desservira principalement le Kazakhstan. Une estimation du coût indique un chiffre de 65 à 100M$, qui sera pris en charge par le Fonds d'Investissement Kazakh, un organisme public.

Le Kazakhstan ne dispose pas des moyens et des savoir-faire nécessaires à la construction et au lancement d'un satellite. Il décide alors de s'associer à son principal partenaire : la Russie. Le 9 janvier 2004, lors d'une visite au Kazakhstan du Président Vladimir POUTINE, un contrat est signé avec Khrounitchev. Le décollage est d'ores et déjà programmé pour fin 2005. Les études préliminaires sont confiées au TsNIIMach, qui présente ses premières esquisses aux représentants kazakhs lors de rencontres organisées les 5 et 6 mai 2004.

Entre temps, le 18 mars 2004, le gouvernement kazakh créé une nouvelle agence chargée de superviser l'ensemble des activités liées aux télécommunications spatiales : le RTsKS (Республиканский центр космической связи). Viktor Dmitrievitch LEFTER prend sa direction. L'organisme dépend de l'agence spatiale kazakhe, Kazcosmos, et sera le propriétaire du satellite KazSat.

Comme le Kazakhstan ne dispose d'aucune infrastructure permettant de suivre, de contrôler et d'exploiter son satellite, il doit la faire construire. C'est à nouveau avec la Russie que le partenariat sera mené. La compagnie publique russe GPKS est désignée comme responsable du projet et sous-traite la construction du segment sol à l'entreprise moscovite Syrus Systems.

Le futur centre, baptisé NKU (Наземный Комплекс Управления), sera bâti à Akkol, dans la région d'Akmola (non loin de la capitale, Astana). Le contrat entre le GPKS et Syrus est signé à Moscou le 21 septembre 2004. En janvier 2005, Khrounitchev sélectionne l'entreprise italienne Alenia Spazio (devenue depuis Thales Alenia Space) pour développer la charge utile du satellite.

Fig. 1 : Position du NKU d'Akkol.

Une étape importante est franchie le 18 janvier 2005. Ce jour là, le Président kazakh Noursoultan NAZARBAÏEV se rend au Kremlin pour y rencontrer Vladimir POUTINE. Trois accords de coopération sont signés par les deux chefs d'Etat; le second porte sur le projet de satellite KazSat. Le projet est ainsi formellement entériné.

Fig. 2 : NAZARBAÏEV et POUTINE signent l'accord sur KazSat, 18 janvier 2005.

Le 1er février 2005, Aleksandr MEDVEDEV, directeur général de Khrounitchev, déclare à la presse que le premier satellite kazakh sera lancé en décembre 2005 par une fusée Proton-M en tandem avec un satellite Ekspress AM du GPKS. Quelques semaines plus tard, KazSat est emmené au NII KhimMach pour y subir des essais thermiques. Ceux-ci se terminent à la fin du mois d'avril 2005. Le 4 mai, le satellite est de retour chez Khrounitchev pour y commencer ses essais dynamiques. Le 26 septembre 2005, le Sénat de la République du Kazakhstan ratifie le projet.

Fig. 3 : Assemblage de KazSat.

Quelques difficultés se font alors sentir. En effet, le dernier satellite Ekspress AM est lancé en juin 2005, c'est-à-dire six mois plus tôt que prévu, et KazSat se retrouve sans compagnon de voyage. Malgré tous les efforts de Khrounitchev, il n'est pas possible de trouver de remplaçant. Les charges utiles commerciales ne peuvent être lancées avec KazSat, car elles doivent être mises en orbite de transfert géostationnaire (GTO), alors que le petit satellite kazakh doit être placé directement en orbite géostationnaire.

Fig. 4 : Essais électriques de KazSat.

Le lancement est reporté au début 2006, et le 9 décembre 2005, selon l'agence Interfaks, ni le satellite ni son lanceur n'ont encore été livrés à Baïkonour. Fin décembre, Khrounitchev annonce que le tir est reporté pour permettre aux ingénieurs de mener à bien des tests supplémentaires de KazSat.

A la mi-janvier 2006, KazSat est emmené au TsAGI pour y subir des essais acoustiques. La pression monte, car les Kazakhs ont payé cher la Russie pour ce satellite, et ils veulent le recevoir dans les délais. Le 26 janvier 2006, les officiels de Kazcosmos annoncent que le lancement aura lieu le 20 juin au plus tard. Début février, les essais électriques du satellite commencent chez Khrounitchev. Le lancement est annoncé pour le 8 juin 2006.

Fig. 5 : Essais dans la chambre à vide du NII KhimMach.

Le lanceur et le satellite sont livrés au cosmodrome dans le courant du mois d'avril. C'est un Proton-M qui devait au départ être utilisé, mais comme KazSat sera lancé tout seul, autant prendre un Proton-K. Le gaspillage de capacité sera déjà énorme et Khrounitchev perdra 37M$ dans l'opération.

Fig. 6 : Essai de déploiement des panneaux solaires.

Le Proton-K est prélevé sur les stocks des Forces Spatiales; il devait servir à lancer un satellite militaire Prognoz, qui du coup devra patienter jusqu'en juin 2008.

Le NKU d'Akkol avait été inauguré le 31 mai 2006. A cette occasion, le président NAZARBAÏEV a évoqué la réalisation d'un satellite KazSat-2.

Fig. 7 : Inauguration du NKU, 31 mai 2006.

En mai, un problème inconnu conduit à un nouveau report de dix jours, et le tir a finalement lieu le 17 juin 2006. Le satellite fonctionne correctement pendant deux années, mais il est perdu le 26 novembre 2008 suite à une panne de son système d'orientation.

Fig. 8 : KazSat est convoyé jusqu'à l'aéroport de Cheremetievo,
d'où il partira pour Baïkonour.

Dès le 29 septembre 2006, Roscosmos avait annoncé sans surprise que c'était Khrounitchev qui avait remporté l'appel d'offres pour le développement et la construction de KazSat-2. Le coût total de ce deuxième satellite, qui ne devra plus simplement compléter le premier mais le remplacer, est estimé à 115M$. Le lancement est à l'origine programmé pour la fin 2009, mais il sera reporté plusieurs fois.

Cette fois, KazSat-2 ne sera pas lancé tout seul, mais couplé à un satellite commercial mis en orbite dans le cadre d'un contrat avec International Launch Services. Les évolutions du lanceur Proton-M permettent dorénavant de placer KazSat-2 en orbite géostationnaire et le satellite commercial en GTO.

Fig. 9 : Essai de déploiement des panneaux solaires.

En mars 2011, pendant des essais en chambre anéchoïde, les ingénieurs découvrent que certains composants taïwanais de l'ordinateur de bord, fourni par le MOKB Mars, résistent mal à l'environnement spatial, pour lequel ils n'ont pas été qualifiés. Le lancement est reporté d'avril à juin 2011. Il a finalement lieu le 15 juillet 2011.

Fig. 10 : Signature du contrat pour KazSat-3 au Bourget, 20 juin 2011.
Les signataires sont Nikolaï TESTOÏEDOV (Rechetniov) et Viktor LEFTER (RTsKS).
En arrière plan, on remarque la présence de Vladimir POPOVKINE (Roscosmos),
Talgat MOUSSABAÏEV (Kazcosmos) et Reynald SEZNEC (Thales Alenia Space).
Crédit : ISS Rechetniov.

Quelques semaines avant cela, le 20 juin 2011, RTsKS avait signé un contrat avec ISS Rechetniov pour le développement d'un troisième satellite, KazSat-3. A la surprise générale, ce n'est donc pas Khrounitchev qui livrera ce troisième avatar. La signature du contrat est intervenue durant le Salon du Bourget. Le lendemain, ISS Rechetniov signe un autre contrat avec Thales Alenia Space pour la fourniture de la charge utile.


Dernière mise à jour : 23 août 2011