Soyouz en Guyane | Histoire du projet

1. Les prémices

Au cours des années 1990, le lancement de satellites commerciaux, principalement dans le domaine des télécommunications, devient un véritable marché. La Russie dispose de nombreux lanceurs extrêmement compétitifs du fait de leur très faible coût de production.

Leurs performances sont toutefois largement sous-exploitées du fait de la position des bases de lancement. Le cosmodrome de Baïkonour au Kazakhstan est, par exemple, situé à 46°N. En comparaison, le Centre Spatial Guyanais (CSG), d'où sont lancées les Ariane européennes, n'est élevé que de 5°14' au-dessus de l'équateur.

Fig. 1 Positions des sites de Kourou et de Baïkonour.
Crédit : DR.

Une telle situation confère deux avantages. Premièrement, le lanceur décollant de Guyane française reçoit plus d'énergie cinétique du fait de la rotation de la Terre que celui décollant de Baïkonour. Deuxièmement, la plupart des satellites commerciaux devant être mis sur des orbites dites de transfert géostationnaire (GTO) situées dans le plan de l'équateur, un lancement depuis le Kazakhstan impose nécessairement un chemin à parcourir plus long.

Ainsi, en 1995, le GKNPTs Khrounitchev propose de lancer sa fusée Proton depuis le CSG. Cette affaire ne connaît pas de suite, mais d'autres prennent le relais. Le KB Youzhnoïe ukrainien envisage de lancer ses fusées Zenit depuis une base flottante située exactement sur l'équateur : ce sera le projet Sea Launch. Parallèlement, elle propose à l'Europe d'établir une coopération devant mener au lancement de Tsiklone-3 depuis le CSG.

Fig. 2 : Le lanceur Tsiklone-3.
Crédit : DR.

Suite à ces propositions, en 1997, le CNES lance sous l'impulsion de Michel MIGNOT, alors directeur du CSG, une vague étude destinée à déterminer le degré de faisabilité technique de l'implantation à Kourou de lanceurs étrangers. L'option la plus réaliste est celle du Tsiklone-3, car elle bénéficie du soutien industriel de l'Allemagne.

La deuxième hypothèse la plus avancée est celle du lanceur russe Soyouz. Ce dernier est en effet très attirant du fait de son extrême fiabilité. Il est, de plus, commercialisé par la société franco-russe Starsem (qui n'a encore effectué aucun lancement).

Fig. 3 : Le lanceur Soyouz.
Crédit : DR.

En 1998, alors que l'idée de voir Tsiklone-3 sous les tropiques a été abandonnée, le projet de lancer Soyouz depuis la Guyane commence à être discutée avec la Russie. Starsem réalise une étude visant à défricher l'aspect technique, mais aussi la viabilité économique d'un tel projet.

Mais le 6 juin 2000, la compagnie Arianespace, qui commercialise les lanceurs Ariane et qui est actionnaire de Starsem, annonce que l'idée est abandonnée. L'investissement nécessaire au projet a été évalué à 28,88M$, et il est jugé trop important à une époque où le marché des constellations de satellites, perçu comme prépondérant, est sur la pente descendante. De plus, les Européens craignent que Soyouz ne vienne concurrencer la famille Ariane sur ses propres terres.

Selon certains, l'histoire s'arrêtera là. L'Europe a statué, sa décision est définitive et sans appel. C'est sans compter avec la persévérance russe.

2. La renaissance

A Moscou, les responsables industriels et politiques accueillent d'un mauvais pied le refus européen. Fermement décidés à lancer leur Soyouz depuis un site équatorial, ils menacent de ne pas renouveler les accords de commercialisation qui ont permis à la société Starsem d'exister.

Ces derniers arrivant à expiration en juillet 2001, il est donc urgent de trouver une solution. De plus, les Russes font pression sur les Européens en brandissant la menace d'une alliance avec Boeing pour lancer Soyouz depuis les îles Christmas australiennes (c'est le projet Soyuz by Boeing).

En avril 2001, la Russie remet à la France une demande officielle d'utilisation du Centre Spatial Guyanais afin d'y effectuer des lancements de Soyouz. Les 23 et 24 avril, le Ministre français de la Recherche, Roger-Gérard SCHWARTZENBERG, est en visite officielle à Moscou et rencontre Youri KOPTIEV, le directeur de Rosaviacosmos. Ce dernier lui réitère la demande et l'informe que cette question est jugée "prioritaire" par la partie russe.

A l'issue de cette rencontre, la création d'un groupe de travail chargé d'étudier le dossier est décidée. Il sera dirigé par Gilles LE CHATELIER et Aleksandr Ivanovitch MEDVEDCHIKOV, respectivement directeur de cabinet du Ministre français de la Recherche et directeur adjoint de Rosaviacosmos. Les premières conclusions devront être remises en juin, c'est-à-dire juste avant la date butoir de juillet où les Russes devront faire leur choix définitif entre une alliance européenne ou australo-américaine.

Fig. 4 : En France, la presse suit avec attention le feuilleton Soyouz.
Crédit : DR.

La Russie a évidemment grand intérêt à ce que le projet aboutisse. Cela lui éviterait d'avoir recours à des lanceurs lourds Proton pour lancer ses petits satellites de télécommunications de type Yamal ou Ekspress, par exemple. Mais quel avantage l'Europe peut-elle trouver à lancer de son propre sol des fusées étrangères près de cinq fois moins chères que les siennes ?

Le principal argument avancé est celui de la complémentarité entre Soyouz et Ariane 5. A moyen terme, l'Europe ne disposera plus que d'un lanceur lourd : l'Ariane 5 ECB, capable de placer 12t en GTO, soit deux satellites de 6t chacun. Or, les études prévoient une multiplication des satellites de moins de 2t. Il se posera alors un sérieux problème d'appairage, car il faudrait alors trouver des satellites de 10t pour pouvoir exploiter pleinement les capacités d'Ariane 5. Il est donc impératif pour l'Europe de disposer d'un lanceur complémentaire, et c'est là que Soyouz intervient.

Certains sont pourtant opposés au projet et avancent que l'implantation du lanceur russe à Kourou ferait perdre un ou deux vols d'Ariane 5 par an. Un féroce débat s'engage donc sur le Vieux Continent entre partisans et opposants de ce que l'on appelle désormais le "programme Soyouz à Kourou".

Fig. 5 : Jean-Jacques DORDAIN, directeur des lanceurs à l'ESA.
Crédit : DR.

En novembre 2001 se tiendra en Ecosse le conseil ministériel de l'ESA. Cet événement est d'une importance capitale pour l'Europe spatiale; c'est en effet à cette occasion que seront prises les grandes décisions directrices qui dessineront les années à venir. A la mi-juin 2001,  Jean-Jacques DORDAIN, directeur des lanceurs à l'ESA, déclare qu'"un lanceur moyen, qui ne serait pas disponible avant 2010, sera forcément plus cher que le Soyouz (...). Le coût de son développement, quant à lui, sera plus élevé que celui de l'installation d'une plate-forme de tir Soyouz à Kourou".

Il se pose donc en partisan du projet, et est bientôt rejoint par Jacques CHIRAC, Président de la République française, qui s'exprime en ces termes au cours de sa visite du centre de Samara, le 3 juillet 2001 : "Il est probable, en tous les cas comme je l'espère, (que) le lanceur Soyouz (puisse) être lancé, demain ou après-demain, sur la base de lancement de Kourou". Selon certaines sources, la France aurait, durant la visite présidentielle, essayé de monnayer la validation du projet contre l'achat par Moscou de trente-six avions Airbus.

Fig. 6 : Le Président CHIRAC lors de sa visite au TsSKB-Progress, le 3 juillet 2001.
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Le lendemain de cette déclaration présidentielle, c'est-à-dire le 4 juillet 2001, l'Assemblée nationale se réunit pour écouter Jean-Michel BOUCHERON, député socialiste d'Ille-et-Vilaine et membre de la commission de la Défense, qui présente son rapport sur "le renseignement par l'image".

Fig. 7 : Jean-Michel BOUCHERON, député d'Ille-et-Vilaine.
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Il y fait référence au fait que "le lanceur Ariane 5 n'est pas économiquement adapté pour des satellites de la classe de ceux d'Hélios 2". La fusée européenne a en effet été "conçue pour satelliser 10 tonnes en orbite géostationnaire et non pas cinq tonnes en orbite basse". M. BOUCHERON note que l'utilisation de Soyouz pour lancer les engins militaires français Hélios 2 s'avérerait beaucoup plus judicieuse.

Selon lui, ce choix illustrerait de plus "la confiance témoignée par la France à la Russie. L'intérêt politique de voir Kourou devenir le creuset d'une forte coopération spatiale russo-européenne est tel que cette hypothèse doit être étudiée avec la plus extrême attention; il n'y a pas de raison que la Russie reste confinée dans ce domaine fondamental au seul partenariat américain."

Le rapport du député mentionne également le coût estimé de la construction d'un pas de tir Soyouz à Kourou : 200M€.

Fig. 8 : Jean-Yves LE GALL, nouveau directeur général d'Arianespace.
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Le 27 août 2001, Jean-Yves LE GALL est nommé directeur général d'Arianespace par les actionnaires. Cette décision n'est pas anodine, car LE GALL est le président-directeur général de Starsem, société dont l'actionnariat est pour moitié russe et qui a tout intérêt à voir Soyouz s'installer en Guyane.

Le conseil ministériel de l'ESA approche. Il débutera le 14 novembre 2001 à Edimbourg. Pour les Européens, il devient donc de plus en plus urgent de se mettre d'accord.

3. Des hésitations européennes au bras de fer avec la Russie

Le débat se réchauffe en effet de plus en plus au sein de l'industrie spatiale européenne. En septembre 2001, un conseil d'administration d'Arianespace se trouve très agité. Les actionnaires sont très partagés sur le dossier "Soyouz à Kourou". Tout le monde est d'accord sur un point : il est fort probable que Soyouz lancé du CSG rencontre un grand succès commercial. La question est : laissera-t-il des satellites à lancer pour Ariane ?

Selon les détracteurs du programme, le lanceur européen peut perdre 25% de son potentiel. De plus, le coût de la construction du pas de tir est maintenant évalué à 250-300M€. Selon Joël BARRE, directeur de la division Espace de la Snecma, le projet n'a "pas de sens en matière de rentabilité économique".

Fig. 9 : François AUQUE, vice-président des systèmes spatiaux d'EADS.
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EADS, au contraire, se dit favorable au projet. Selon François AUQUE, le vice-président des systèmes spatiaux chez le géant européen, "Soyouz à Kourou peut être un complément utile d'Ariane et peut permettre au couple Ariane/Soyouz de capter plus de marchés que séparément".

Le consortium aérospatial exprime également ses inquiétudes quant au fait de laisser aux Etats-Unis le monopole de la coopération avec la Russie.

En attendant, certains optimistes commencent à prévoir les modalités en cas de réponse positive du conseil d'Edimbourg. Il est décidé que la Russie, l'ESA et l'industrie européenne fourniront chacune un tiers du budget. Du côté de la gestion, Arianespace devrait se charger de l'exploitation du lanceur. Il est en effet préférable qu'une société unique gère Soyouz et Ariane, de manière à éviter une concurrence que Roger-Gérard SCHWARTZENBERG, le Ministre de la Recherche, qualifie d'"anarchique".

Fig. 10 : Roger-Gérard SCHWARTZENBERG, Ministre français de la Recherche.
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Des débats ont également lieu entre l'Europe et la Russie quant au prix des lanceurs. En octobre 2001, Philippe COUILLARD, président-directeur général d'EADS LV, déclare dans les colonnes d'Air&Cosmos que ce coût devra permettre d'"assurer la rentabilité avec trois à quatre vols par an". Russes et Européens ne sont toutefois pas du tout d'accord sur ce sujet. Le prix proposé par les Russes - environ 20M$ - retarderait le retour sur investissement de plusieurs années.

Une autre exigence de la partie européenne est d'avoir l'exclusivité de l'exploitation de Soyouz. Il serait en effet inacceptable qu'une autre nation, comme les Etats-Unis, concurrence Arianespace avec le même lanceur. Les Russes sont réticents à accepter cette condition car ils comptaient bien lancer leur Aurora depuis les îles Christmas australiennes. Or, selon la Russie, Aurora n'est pas un dérivé du Soyouz, mais un lanceur nouveau. Il n'est donc pas soumis aux restrictions proposées par les Européens. Ces derniers ne sont bien sûr pas d'accord avec cet argument.

Fig. 11 : Les lanceurs Soyouz (g) et Aurora (d).
Selon les Russes, il n'y a aucun rapport entre les deux.
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Le 8 novembre 2001, M. SCHWARTZENBERG répond aux questions de la commission de la production et des échanges sur le budget de la Recherche. Quand le dossier "Soyouz à Kourou" est abordé, le ministre déclare que le projet n'est envisageable que si les quatre conditions suivantes sont acceptées par les Russes :

     - La Russie devra participer à un tiers au financement de la construction du pas de tir,
     - Le prix des lanceurs devra être abaissé,
     - L'Europe devra avoir une véritable exclusivité sur le lanceur Soyouz et ses dérivés,
     - Arianespace devra être l'opérateur de Soyouz; cette condition est d'ores et déjà acceptée.

Selon le Ministre de la Recherche, les trois dernières conditions ne sont pas encore acceptées par la partie russe. Concernant le financement de la plate-forme, un problème se pose car Rosaviacosmos ne dispose pas du budget suffisant. Les Européens proposent de considérer les matériels fournis par les Russes comme un paiement en nature. Mais les intéressés ne semblent pas séduits par cette offre. Des réponses précises devront pourtant être données dans les jours qui viennent pour pouvoir prendre des décisions au conseil d'Edimbourg, qui débute dans six jours.

Mais les réponses ne viennent pas. Le grand conseil ministériel, tant attendu depuis fort longtemps, s'ouvre à l'heure dite le 14 novembre 2001. Quand le dossier "Soyouz à Kourou" est abordé, aucun fait tangible ne peut être présenté. Dans ces conditions, les ministres européens s'abstiennent de décider quoi que ce soit et se contentent de mandater le directeur général de l'agence, Antonio RODOTA, pour continuer les négociations avec les Russes. L'objectif est maintenant d'arriver à un accord avant juin 2002, date du prochain conseil de l'ESA.

Mais la Russie ne semble pas vouloir céder la moindre parcelle de terrain à l'Europe. Du 3 au 5 décembre 2001 se tient à Paris un colloque sur les activités spatiales en Russie et en Ukraine organisé à l'initiative de la Fédération Internationale d'Astronautique.

Fig. 12 : Aleksandr MEDVEDCHIKOV, directeur adjoint de Rosaviacosmos.
Crédit : DR.

MEDVEDCHIKOV, le directeur adjoint de Rosaviacosmos, annonce à cette occasion que son pays étudie l'utilisation de cinq sites équatoriaux pour lancer ses fusées. Aleksandr KOUZNIETSOV, directeur général adjoint de Rosaviacosmos délégué aux lanceurs, maintient que l'Aurora n'est en rien un dérivé du Soyouz, auquel il n'emprunte que les propulseurs d'appoint. Il n'y a donc aucun problème à exploiter les deux lanceurs simultanément, en Guyane et aux îles Christmas australiennes.

Une chose est claire : la Russie ne veut pas céder sur les trois conditions imposées par l'Europe. Pour forcer la main à ces derniers, elle décide d'agiter la carte australienne. Ainsi, le 14 décembre 2001, Russes et Australiens signent un accord de coopération visant à effectuer un premier tir depuis les îles Christmas fin 2004.

Avec le recul, cet événement ressemble fort à du bluff, car il apparaît très naïf de tabler sur un développement de l'Aurora en moins de trois ans... Mais sur le coup, les Européens, Français en tête, n'apprécient guère cette subite entente russo-australienne.

Cinq jours après la signature de l'accord, le CNES fête en grande pompe son quarantième anniversaire. A cette occasion, le Président Jacques CHIRAC apporte son soutien au projet, accompagné du Premier Ministre Lionel JOSPIN.

De même, le 7 janvier 2002, lors de la présentation de ses vœux à la presse, Jean-Marie LUTON, président-directeur général d'Arianespace, déclare qu'il est nécessaire de disposer d'un lanceur comme Soyouz pour remplacer Ariane 4, qui doit être retirée du service en 2003. Il affirme également n'avoir "reçu aucune réponse sur la participation financière des Etats membres de l'ESA, de l'industrie européenne et de la Russie". De plus, selon lui, Arianespace "cherche un moyen de réduire l'investissement".

Fig. 13 : Youri KOPTIEV, directeur de Rosaviacosmos.
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Le 28 février 2002, Youri KOPTIEV, directeur de Rosaviacosmos, se rend au Centre Spatial Guyanais à l'occasion d'un lancement d'Ariane 5. Il déclare au Figaro que, côté russe, un dossier complet sera prêt pour le conseil de l'ESA prévu les 12 et 13 juin à Montréal. Quand le journaliste Fabrice NODE-LANGLOIS l'interroge au sujet du projet Aurora et de l'exclusivité européenne sur l'exploitation de Soyouz, KOPTIEV répond que "ce n'est pas un problème. L'exclusivité de Soyouz sera assurée. Aurora est un lanceur complètement différent".

4. Un premier pas important

Le 12 juin 2002 s'ouvre donc à Montréal le conseil de l'ESA. Les dirigeants de l'agence évaluent le coût total du projet "Soyouz à Kourou" à 275M€. Ce prix inclut 145M€ pour l'industrie européenne, 110M€ pour l'industrie russe, ainsi que 20M€ de taxes versées à la Guyane.

Mais le conseil ne parvient pas à déterminer qui va payer cette somme. Ce pourrait être les Etats membres, la Russie, les industriels, ou encore la Commission européenne... Malgré tout, l'ESA décide d'adopter la résolution. Le programme est ainsi lancé ! Des négociations entre les différents partenaires sont engagées; elles doivent aboutir à un accord avant la fin de l'année. Malgré l'invitation du Président POUTINE, l'Union européenne refuse catégoriquement de participer au financement.

Fig. 14 : Claudie HAIGNERE, nouvelle Ministre de la Recherche.
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De leur côté, les Russes accueillent la nouvelle avec joie. Ce qui ne les empêche pas de continuer de plus belle le projet d'implantation de l'Aurora aux îles Christmas. Le 8 juillet, Claudie HAIGNERE, qui a remplacé Roger-Gérard SCHWARTZENBERG au Ministère de la Recherche, se rend à Moscou et y rencontre Youri KOPTIEV pour discuter du dossier.

En Europe, les négociations vont bon train. La Commission européenne se dit prête à participer au financement. Elle pourrait lever des fonds sur les budgets du développement de la Guyane française, de la coopération avec la Russie et des programmes technologiques.

Il est décidé que les Européens s'occuperont des travaux de terrassement et que les Russes fourniront la plate-forme. D'ailleurs, ces derniers s'engagent à ne pas dépasser les coûts préalablement définis.

En juillet 2002, Jean-Jacques DORDAIN déclare : "tous les pays sont d'accord pour coopérer avec la Russie. Par ailleurs, on a montré que l'exploitation ne se ferait pas au détriment d'Ariane 5 et de Vega". C'est une façon de tordre le cou aux derniers détracteurs du projet... Le prochain conseil ministériel de l'ESA se tiendra début 2003. Si le projet est définitivement accepté à ce moment-là, le premier lancement pourrait avoir lieu dès 2006.

En septembre 2002, la sous-direction sol (SDS) du CNES commence une étude de faisabilité technique. La première phase est qualifiée d'étude d'"avant-projet".

Le 18 novembre 2002 se tient à Toulouse le huitième séminaire intergouvernemental franco-russe. A cette occasion, le Premier Ministre Jean-Pierre RAFFARIN, se déclare "optimiste" quant à un bouclage du dossier au "tout début 2003". Mikhaïl KASSIANOV, Premier Ministre russe, affirme pour sa part qu'il est satisfait de "l'avancement (...) dans le règlement des problèmes de financement".

Fig. 15 : Mikhaïl KASSIANOV, Premier Ministre russe.
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Du 3 au 6 décembre 2002, une douzaine d'ingénieurs russes sont accueillis au CSG. Ils visitent le site de Malmanoury où sera construit le pas de tir en cas de succès des négociations. Cinq jours après leur départ, le 11 décembre, la nouvelle version ECA (Evolution Cryotechnique de type A) du lanceur européen Ariane 5 explose en plein vol, plongeant l'industrie du transport spatial du Vieux Continent dans une très grave crise.

Les 17 et 18 décembre 2002, la première phase de l'étude de la SDS s'achève et un comité directeur se tient le 17 janvier 2003. Il détermine que le site le mieux adapté à recevoir l'Ensemble de Lancement Soyouz (ELS) est Malmanoury-nord. De plus, le coût total du projet est évalué à 270M€, auquel il convient de rajouter 30M€ d'aléas. La deuxième phase de l'étude, dite d'"avant-projet détaillé", peut alors commencer.

Pendant ce temps, dans le courant du mois de janvier 2003, l'ESA annonce qu'elle est en train de finaliser un accord qui devrait être validé par le conseil ministériel du mois de mars et signé par les Russes en avril. La première pierre pourrait ainsi être posée en mai 2003. Ces déclarations sont encourageantes; elles font toutefois oublier que de nombreuses questions demeurent quant au financement du projet.

Le 11 février 2003, à Paris, Antonio RODOTA signe avec le Ministre russe des Affaires étrangères Igor IVANOV un accord de coopération russo-européenne qui mentionne notamment le projet d'implantation du Soyouz en Guyane.

Le 22 avril 2003, Mme HAIGNERE déclare devant l'Aéroclub de France que le projet "Soyouz à Kourou" est dorénavant intégré dans le programme plus large FLPP (Future Launcher Preparatory Program). C'est une bonne nouvelle, car cela va permettre à l'ESA d'utiliser pour "Soyouz à Kourou" des fonds préalablement affectés à d'autres programmes. La Ministre annonce également que le conseil ministériel n'aura pas lieu en mars, mais le 27 mai 2003.

5. Le conseil ministériel de 2003 : le tournant

On s'en souvient, le précédent conseil ministériel de novembre 2001 n'avait pas permis de prendre de décision car le dossier n'était pas complet, aucun élément n'étant encore défini. Cette fois, l'ESA présente à ses ministres un argumentaire solide et un plan de financement précis.

On l'a dit, l'investissement global est estimé à 314M€. Sur cette somme, 193M€ seront payés par les Etats membres de l'agence (135,8M€ tout de suite et 57,2M€ à partir de 2006), et 121M€ seront fournis par Arianespace pour acheter le matériel russe. Moscou a en effet gagné sur ce point : ses fournitures ne seront pas considérées comme un paiement en nature.

Le conseil se tient comme prévu à Paris le 27 mai 2003. C'est un énorme succès, aussi bien pour le projet "Soyouz à Kourou" que pour l'ensemble du transport spatial européen ! Les Etats membres se sont mis d'accord et ont accepté définitivement le programme. Sur le plan du financement, plus de 60% des 193M€ ont été débloqués lors du conseil. Les 40% restants ne devant pas tarder. Le graphique 1 montre la part de chaque Etat participant.

Graphique 1 : Participations des Etats européens au projet "Soyouz à Kourou",
telles qu'elles ont été décidées au conseil ministériel du 27 mai 2003.
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La France, sans surprise, fournit la moitié des fonds nécessaires. En revanche, on s'attendait à une plus forte participation de l'Allemagne. L'Autriche, l'Italie et l'Espagne se sont également engagées à participer, mais n'étaient pas en mesure d'évaluer à quel niveau lors du conseil. Enfin, la Belgique a promis d'élever sa contribution d'une somme indéterminée. Les autres nations ont jusqu'au 11 décembre 2003 pour faire connaître leur désir de participer.

Claudie HAIGNERE avait annoncé plus tôt que la participation française était incluse dans le budget annuel qu'elle souscrit à l'ESA. Pour ce qui est du calendrier, un premier vol avait été prévu pour 2006, mais l'ESA a laissé entendre à la sortie du conseil que ce serait probablement pour plus tard. Pourtant, quelques semaines plus tard, à l'occasion du Salon du Bourget, Youri KOPTIEV déclare que les travaux à Kourou débuteront en septembre 2003 et s'achèveront fin 2005, autorisant ainsi un premier lancement début 2006.

Quoi qu'il en soit, le conseil ministériel du 27 mai 2003 peut être considéré comme historique, car il a permis un redressement du secteur des lanceurs en Europe et a ouvert la voie au plus important programme de coopération spatiale entre l'Europe et la Russie.

6. Poursuite des négociations

A l'été 2003, les premiers arbres commencent à être coupés sur le site de Malmanoury. Au mois de juillet, l'étude de faisabilité démarrée en septembre 2002 arrive à son terme. La SDS a conclu que le projet est techniquement réalisable, à condition de se préoccuper des points suivants :

     - sécurité au sol et durant le vol,
     - utilisation de l'étage Fregat,
     - définition des caractéristiques des infrastructures de lancement.

Du 5 au 8 octobre 2003, Claudie HAIGNERE et Jean-Pierre RAFFARIN rencontrent à Moscou le Premier Ministre Mikhaïl KASSIANOV pour discuter de l'avancement du projet et signer un important accord. Ce dernier doit donner une consistance juridique au projet, car le conseil du 27 mai n'avait fait qu'autoriser son développement dans le principe.

En France, la presse spécialisée annonce le succès de la signature du document, mais en réalité il n'en est rien. Les Français n'ayant transmis le texte aux Russes que deux jours seulement avant l'arrivée de Jean-Pierre RAFFARIN à Moscou, Rosaviacosmos n'a pas eu le temps d'examiner attentivement les propositions.

Fig. 16 : Le député Christian CABAL.
Crédit : DR.

Lors de la neuvième session de la commission parlementaire France-Russie, entre le 19 et le 22 octobre 2003, le député Christian CABAL fait remarquer qu'en Guyane la saison des pluies commence à la fin du mois de novembre. Comme elle rend la zone marécageuse et inaccessible aux travaux, perdre du temps dans la signature de l'accord retarderait le début du chantier de près d'un an.

Christian CABAL fait également référence à certaines inquiétudes que lui et certains de ses collègues russes et français partagent concernant des "tentatives américaines pour bloquer cet accord". Il déclare : "en l'état de mes informations, nous sentons que la partie américaine est très active sur ce dossier."

Le 31 octobre 2003, le commissaire européen à la Recherche, Philippe BUSQUIN, rencontre le Vice-premier Ministre russe, Boris ALIOCHINE. Les deux responsables discutent longuement de la situation du dossier "Soyouz à Kourou" et déplorent qu'il n'ait pas pu être signé lors de la visite de Jean-Pierre RAFFARIN en Russie.

Le 7 novembre 2003, le Président POUTINE se rend à Paris. Il est accompagné de son Vice-premier Ministre, Boris ALIOCHINE, qui rencontre Jean-Pierre RAFFARIN. L'accord qui aurait dû être ratifié en octobre est enfin signé.

Fig. 17 : Le Président Jacques CHIRAC reçoit son homologue russe,
Vladimir POUTINE au Palais de l'Elysée, le 7 novembre 2003.
Crédit : DR.

Il "définit les principes de coopération entre les deux Etats et fournit le cadre juridique nécessaire à l'implantation d'un pas de tir Soyouz au Centre Spatial Guyanais". Il met également au clair les "conditions dans lesquelles la France autorise l'installation du pas de tir en Guyane et dans lesquelles la Russie fournit les lanceurs".

La prochaine étape est le conseil de l'ESA des 17 et 18 décembre 2003. Il doit boucler la question du financement du projet, qui, rappelons-le, n'est pour l'instant décidé qu'à un peu plus de 60%.

Malheureusement, aucun consensus n'est trouvé. L'Allemagne veut bien augmenter sa participation, mais à condition que les autres Etats s'investissent davantage dans le programme FLPP. De son côté, l'Italie ne veut contribuer que si on lui apporte des fonds qui lui manquent pour le projet de lanceur Vega. Le conseil est en conséquence suspendu jusqu'au 4 février 2004.

Les différents partenaires mènent d'âpres négociations pendant plusieurs mois, et le 4 février 2004 ils se réunissent à nouveau. Cette fois, le conseil se termine en grand succès ! Le programme "Soyouz à Kourou" est maintenant financé à 87,5% selon la répartition montrée par le graphique 2.

Graphique 2 : Participations des Etats européens au projet "Soyouz à Kourou",
telles qu'elles ont été décidées au conseil du 4 février 2004.
Crédit : DR.

Le 4 février, l'Italie n'apporte que 8% mais promet que sa contribution passera à 12% en juin 2004. La Belgique et la Suisse augmentent substantiellement leurs participations respectives, alors que la France doit augmenter la sienne de 8% pour passer à presque 60% du financement global du projet ! L'Espagne décide également de se lancer dans ce programme. L'Allemagne, quant à elle, se cantonne à ses 6%.

Par ailleurs, l'Union européenne s'est dite intéressée par ce projet et pourrait apporter 6% lors du prochain conseil prévu en juin. Il faut toutefois remarquer que le coût total du projet a été réévalué à 344M€, au lieu de 314M€ précédemment. Les 30M€ supplémentaires sont pris en charge par l'ESA, dont la contribution s'élève donc maintenant à 223M€. Les 121M€ restants sont toujours pris en charge par Arianespace.

A la fin du mois de février 2004, des spécialistes du KBOM, l'entreprise russe qui est responsable de la construction du pas de tir et des bâtiments d'intégration, arrivent au CSG.

En avril 2004, le Comité de Politique Industrielle (CPI) de l'ESA se réunit pour définir le rôle de chacun des acteurs du projet. Le CNES se voit confier le titre d'"Architecte système", c'est-à-dire contractant principal pour l'ensemble du programme. L'agence française de l'Espace devra donc recevoir des contrats de l'ESA pour toutes les opérations à venir.

La société Arianespace, elle, joue plusieurs rôles. En plus d'être l'exploitant commercial des lanceurs une fois la construction menée à son terme, elle est sous-contractante du CNES pour la fourniture du matériel russe. Ainsi, pour le pas de tir par exemple, le CNES le commandera à Arianespace, qui à son tour le commandera à Roscosmos (représentant à la fois de l'Etat russe et de toutes les entreprises russes impliquées dans le projet) qui à son tour le commandera au KBOM. Les 121M€ apportés par Arianespace correspondent précisément à l'ensemble des matériels qu'elle devra acheter en Russie.

Le 12 mai 2004, pendant le salon de Berlin ILA-2004, Arianespace annonce que le premier contrat pour Soyouz lancé de Kourou a été signé ! Ironie du sort, il s'agit d'un satellite australien : Optus D2... De son côté, le général Anatoli PERMINOV, qui a remplacé Youri KOPTIEV à la tête de l'agence spatiale russe, qui est devenue Roscosmos, déclare à la presse que le pas de tir est déjà en préparation en Russie. Le vol inaugural est annoncé pour le 1er décembre 2006; en outre, il n'y aura pas de vol de qualification précédant le lancement d'Optus D2.

7. Difficultés financières européennes

Pendant ce temps, Arianespace négocie avec la Banque Européenne d'Investissement (BEI) pour bénéficier d'un emprunt, car la société ne peut pas financer sur fonds propres les 121M€ qu'elle s'est engagée à fournir. L'ESA se porte garante auprès de la BEI pour soutenir Arianespace, mais les discussions sont tout de même complexes... Un conseil de l'ESA se tient les 16 et 17 juin 2004, mais aucune décision n'est prise.

Le vol inaugural est maintenant prévu pour mars 2007. Les travaux de terrassement devaient commencer en juillet 2004, mais ils devront être repoussés car la BEI refuse d'avancer de l'argent à Arianespace. Elle souhaite en effet que ce soit la Commission européenne elle-même qui se porte garante. Or, cette dernière ne peut prendre un tel engagement avant d'entrer dans son budget 2007-2013, c'est-à-dire avant l'année 2007. La BEI accepte alors de financer le projet avec la garantie de "seulement" un ou plusieurs gouvernements européens.

Le 10 décembre 2004, Jean-François COPE, Ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, propose à l'Assemblée nationale un amendement au projet de loi de finance pour 2005. Il s'exprime en ces termes : "Voilà un amendement qui devrait plaire au groupe communiste, puisqu'il s'agit d'accorder la garantie de l'Etat au prêt de 121M€ effectué par la société Arianespace auprès de la BEI pour l'installation dans le Centre Spatial Guyanais d'un nouveau pas de tir pour le lancement de la fusée russe Soyouz-ST. Ne serait-ce qu'en mémoire de Youri GAGARINE, vous pourriez voter cet amendement (...)".

Ainsi, l'Assemblée adopte l'amendement à l'unanimité. La BEI a donc la garantie de la France. Cinq jours plus tard, c'est-à-dire le 15 décembre 2004, le conseil de l'ESA se réunit à nouveau et cette fois donne son feu vert final. Les Etats membres augmentent leurs contributions (63,13% pour la France, 6,53% pour la Belgique, 3,26% pour l'Espagne, 2,72% pour la Suisse) à l'exception de l'Allemagne, qui repasse à 5,65%, et de l'Italie, qui n'apporte finalement que 8,71%. Par contre, l'Autriche décide de se joindre au projet, qui est donc financé à 91%. Les 9% restants doivent être fournis par l'Union européenne.

En Guyane, les premiers travaux de terrassement commencent dès le tout début du mois de janvier. Une telle réactivité est due au fait que le CNES, responsable de ces travaux, avait anticipé le succès des négociations et avait déjà choisi les industriels.

Le 19 janvier 2005, Jean-Jacques DORDAIN, devenu directeur général de l'ESA, et Anatoli PERMINOV signent à Moscou un accord de coopération euro-russe à long terme. Le document fait notamment mention du projet "Soyouz à Kourou".

Fig. 18 : Signature de l'accord du 21 mars 2005 à l'Hôtel Matignon.
Crédit : DR.

Un nouveau pas important est franchi le 21 mars 2005, jour où quatre conventions fixant le financement du projet sont signées par le Premier Ministre, Jean-Pierre RAFFARIN, le Ministre de la Recherche, François D'AUBERT, le Ministre de l'Economie, Thierry BRETON, le directeur général de l'ESA, Jean-Jacques DORDAIN, le directeur général d'Arianespace, Jean-Yves LE GALL, et le président de la BEI, Philippe DE FONTAINE VIVE. La question du financement du projet est dorénavant réglée pour de bon.

8. Les choses sérieuses commencent

Le 11 avril 2005, Jean-Yves LE GALL se rend à Moscou pour y rencontrer le général PERMINOV et signer le premier accord concret depuis le début des négociations. Il s'agit du fameux contrat de commande de matériel russe, dont la valeur est de 121M€. Il comporte deux volets : l'un concerne le pas de tir, l'autre les lanceurs Soyouz en version 2.1b.

Pour le premier volet, la Russie devra fournir le pas de tir ainsi que tous les équipements liés au lanceur Soyouz. Concernant le second volet, le contrat demande aux Russes d'adapter la fusée aux conditions du CSG (domaine de sécurité, télémétrie, conditions climatiques) et de développer la version Soyouz-2.1b.

Fig. 19 : A Moscou, le 11 avril 2005.
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Pendant ce temps, Arianespace continue de signer des contrats pour Soyouz. Le premier vol, devant emporter l'Optus D2, est maintenant annoncé pour le début 2008. Or, pendant le salon du Bourget de juin 2005, on apprend qu'il n'est plus prévu avant octobre-novembre 2008.

Le 19 juillet 2005, Jean-Jacques DORDAIN et Yannick D'ESCATHA, président du CNES, se rencontrent pour signer le contrat de développement. Il s'agit du document qui autorise le CNES à commencer les travaux de construction des infrastructures en Guyane.

Fig. 20 : Jean-Jacques DORDAIN et Yannick D'ESCATHA, le 19 juillet 2005.
Crédit : DR.

Les travaux de terrassement s'achèvent en décembre 2005. A ce moment, le CNES attribue le contrat de construction des infrastructures (en dehors du pas de tir et des bâtiments spécifiques à Soyouz, qui sont la responsabilité du KBOM) au groupe Vinci. Le contrat est signé le 9 décembre 2005 par Michel EYMARD, Directeur de la Direction des Lanceurs du CNES, et Pierre BERGER, Président de Vinci Construction Grands Projets.

Ce dernier représente également le groupement industriel Soyouz Infrastructure. Ce groupement comprend INFRASOYOUZ, un consortium constitué de Vinci Construction Grands Projets et de Nofrayane, ainsi que MT Aerospace, Clemessy et le consortium ACIA (regroupant Axima Belgique, Crystal France, Intemann Autriche et Axima France).

Les travaux doivent durer 31,5 mois à compter du 9 décembre 2005, et doivent donc prendre fin en juillet 2008. La première grande étape est la construction du carneau, qui va prendre un an.

Le 13 février 2006, Dominique DE VILLEPIN, nouveau Premier Ministre français, se rend en Russie en voyage officiel. Il est accompagné de Jean-Yves LE GALL qui signe avec le général PERMINOV le premier contrat d'approvisionnement en lanceurs Soyouz. La commande porte sur quatre fusées pour un montant global de 80M€. Il avait été décidé que chaque lancement serait facturé aux clients environ 40M$.

Fig. 21 : Le chantier Soyouz, à la fin 2006.
Crédit : DR.

A la fin de l'année 2006, les travaux de terrassement sont terminés et le carneau est creusé. Pour cette dernière opération, 200 000 mètres cubes de matériaux auront été enlevés. Parallèlement, les fondations des différents bâtiments ont été bien avancées.

Le 13 février 2007, Aleksandr KIRILINE, directeur général du TsSKB-Progress, entreprise qui construit les lanceurs Soyouz, annonce que la première fusée sera envoyée en Guyane en octobre-novembre 2007, pour un lancement toujours prévu octobre-novembre 2008. Mais le 21 février 2007, Viktor REMICHEVSKI, directeur adjoint de Roscosmos, annonce que le premier vol pourrait être reporté à décembre 2008 en raison de "difficultés rencontrées par les Européens pendant la construction" et de la "nécessité d'harmoniser les normes russes et européennes".

Fig. 22 : Inauguration du chantier Soyouz, le 26 février 2007.
Crédit : DR.

Le 26 février 2007 est un grand jour pour le projet : c'est l'inauguration du chantier ! Le général PERMINOV fait le déplacement à Kourou et offre au CNES la pierre qu'il avait extraite du sol de la zone de lancement n°1 du cosmodrome de Baïkonour deux ans plus tôt. Pour Jean-Jacques DORDAIN, le programme marque le commencement d'une "nouvelle ère de lanceurs pour l'Europe".